Une des conclusions fortes du dossier climatique est que la température moyenne au niveau du sol va augmenter si la concentration de l'atmosphère en gaz à effet de serre augmente. Mais de combien ? Les modélisations les plus récentes donnent une fourchette de 1,5 à 6 °C à l'horizon d'un siècle (c'est à dire en 2100) selon les modèles et les scénarios retenus (schéma ci-dessous).
Prédictions de l'augmentation de la température moyenne de surface entre 1990 et 2100 selon les scenarios et les modèles. Chaque scénario d'émission de gaz à effet de serre (désigné par un sigle) a une couleur différente et correspond à des hypothèses différentes.
Pour une couleur donnée, donc un scénario donné, la barre à droite de cette couleur donne la fourchette de l'élévation possible de température moyenne en 2100, selon les modèles. Par exemple le scénario A1B, en rouge gras, engendre une élévation de température de 2 à 4°C selon les modèles (le modèle le moins sensible - c'est à dire le moins "réactif" à nos émissions supplémentaires - donne "seulement" 2°C, et le plus sensible donne jusuq'à 4 °C, et pour ce scénario les 15 modèles utilisés donnent des prédictions qui sont toutes comprises entre 2 et 4 °C).
Le scénario B2, en vert, conduit à 1,5 à 2,5 °C en plus selon les modèles, etc. La courbe de la couleur correspondante matérialise l'évolution médiane (c'est à dire "au milieu") de la fourchette. Le trait noir tireté à droite (IS92) correspond à la fourchette du précédent rapport du GIEC, en 1996.
La zone gris foncé représente alors l'enveloppe de tous les scénarios, et la zone gris clair montre le surcroît de différence (on parle de "dispersion" des résultats) ajouté par le fait que pour un même scénario les différents modèles donnent des résultats différents.
Source : GIEC, 2001 |
Mais il importe de se rappeler de 2 choses essentielles :
Ces augmentations de température ne surviendront pas "quoi qu'il arrive" : elles constituent la réponse probable du système climatique à une émission de gaz à effet de serre future, et l'avenir n'étant pas totalement écrit cette émission future est par nature hypothétique (voir scnéarios).
Toutefois, plus nous souhaitons généraliser au monde entier notre mode de vie, et plus les émissions seront tirées vers le haut. Le scénario le plus pessimiste du GIEC reste très modéré par rapport à une situation où chaque Terrien vivrait comme un Américain moyen d'aujourd'hui (vu que chaque Terrien n'est pas loin de vivre aujourd'hui comme un habitant des pays occidentaux en 1900, une telle évolution n'est pas imposssible tant qu'aucune catastrophe ne vient interférer). Dans ce cas de figure, les émissions en 2050 seraient quasiment le double de l'hypothèse haute !
les différentes élévations de température obtenues avec les modèles reflètent pour moitié les différents scénarios choisis, et pour moitié les différentes conceptions des modèles (et notamment la prise en compte des nuages).
Enfin aucune expérience de modélisation n'a jamais abouti à la conclusion que la Terre pourrait ne pas se réchauffer suite à nos émissions de gaz à effet de serre.
En outre, avec les scénarios utilisés aujourd'hui, toutes les modélisations prédisent une évolution extrêmement brusque, voire brutale, de la température (ci-dessous).
Mise en perspective de la température reconstituée ou mesurée, de l'an 1000 à l'an 2000, et des élévations possibles au 21è siècle. En fait ce qui est représenté n'est pas la température moyenne de la planète, mais la différence de cette température moyenne avec la moyenne de l'année 1990. Par exemple, en l'an 1860, il a fait 0,5 °C de moins (moyenne mondiale) qu'en 1990.
La température des années 1000 à 2000 est matérialisée par la courbe rouge. La zone grisée représente la marge d'incertitude pour les périodes anciennes, pour lesquelles les températures ne sont pas mesurées - il n'y avait pas de thermomètres partout à ces époques ! - mais reconstituées à partir de prélèvements, dans la glace, les fonds marins, les coraux, les troncs d'arbre.... photo Pour les années 2000 et au-delà, le graphique représente la réponse donnée par les modèles, en fonction des scénarios d'émission de gaz à effet de serre pour le 21è siècle. Chaque courbe de couleur correspond à un même scénario, appliqué à un ensemble de 15 modèles différents, et dont on a représenté la moyenne tous modèles confondus. L'enveloppe marron matérialise les extrêmes, c'est à dire l'écart entre la plus petite élévation, pour les émissions les plus faibles et le modèle le moins "réactif", et l'élévation maximale, obtenue avec le scénario "haut" pour les émissions et le modèle le plus "réactif".
Dans tous les cas de figure, l'évolution est beaucoup plus brutale que ce à quoi la variabilité naturelle du climat nous a habitués. Et ces projections ne tiennent pas compte du possible dérèglement du cycle du carbone.
Source : Climate Change 2001, the scientific basis, GIEC, 2001 |
Et que se passe-t-il au-delà de 100 ans ? Le climat célèbre-t-il l'année 2100 à sa manière en retournant à un état normal ? Malheureusement non : les gaz à effet de serre ont une durée de séjour très longue dans l'atmosphère, et donc la perturbation du climat que nous avons mise en route va se poursuivre pendant des milliers d'années de toute façon, avec, par contre, une ampleur qui dépend encore de ce que nous allons émettre comme gaz à effet de serre au cours du 21è siècle, comme le graphique ci-dessus le montre bien.
Et, hélas, même en cas de suppression totale des émissions demain matin, les concentrations - et donc "l'effet de serre" lié à ces gaz que nous avons mis dans l'atmosphère - ne décroîtraient que très lentement, et même avec une hypothèse aussi extrême nous ne retrouverons pas le niveau "pré-industriel" avant des dizaines de milliers d'années.
En conséquence, le maximum des températures n'est atteint que bien après que le maximum de concentration en gaz le soit, et les valeurs atteintes en 2100 pour les divers scénarios d'évolution ne représentent que 50% environ du maximum absolu à venir ultérieurement (cf. figure ci-dessous).
Ce graphique représente, selon la concentration de l'air en CO2 au moment où cette dernière cessera d'augmenter (nous sommes actuellement à 370 et sommes partis pour bien plus), la fourchette d'élévation de température en 2100 comparée à la fourchette "à terme".
Par exemple, si nous parvenons à stabiliser la contration atmosphérique en CO2 à 750 ppm d'ici quelques siècles (ce qui est déjà énorme), l'élévation de température en 2100 oscillera (avec le modèle utilisé ici) entre 2 et 3,5 °C (attention : ici nous ne sommes pas à 750 ppm en 2100, mais à terme), et celle à terme (quelques siècles plus tard) serait comprise entre 2,7 et 7°C.
On voit donc facilement que la température continue d'augmenter bien après 2100, et que l'augmentation résiduelle est d'autant plus forte que l'augmentation prévue à cette date (les journaux ne parlent que de celle-là) est déjà importante.
Il est aussi facile de voir que l'élévation de température à terme pourrait être le triple de celle en 2100 : les ennuis ne seront pas terminés en 2101...
Source : GIEC, 2001 |
Si l'on regarde ce que donnent les modèles non plus sur 1 siècle mais sur une durée plus longue (quelques siècles), l'augmentation de température pourrait fort bien dépasser 10°C lorsque le maximum sera atteint (dans l'hypothèse haute où nous émettrions des quantités sans cesse croissantes de gaz à effet de serre pendant le siècle à venir).
Bien sur le modèle ne reste pas forcément valable pendant des siècles, mais on peut alors raisonner de la manière suivante :
soit notre système climatique reste à peu près ce qu'il est avec une telle augmentation de température. La prolongation du modèle, qui représente le système climatique, est donc valide à cette échéance, et un tel maximum n'est pas à exclure. Les conséquences possibles engendrées par une telle augmentation - que la terre n'a probablement jamais connue depuis qu'elle héberge de la vie - en un laps de temps si court ne permettraient vraisemblablement pas le maintien de notre forme actuelle de civilisation et la vie confortable - voire la survie pour une partie - de quelques milliards d'hommes sur la Terre.
soit le système climatique se modifie profondément bien avant, par suite d'une modification brutale d'une de ses composantes (voir risques et puits). Du coup le modèle, qui représente le système actuel, n'est plus valide, et nous entrons alors dans l'inconnu, qui peut être plus agréable, mais aussi... encore plus désagréable que ce que prévoit le modèle.
Il faut rappeler que nous n'avons aucune visibilité historique (donc aucun moyen de savoir ce qui se passe en pareil cas) concernant une élévation rapide de température de quelques degrés au-dessus des températures actuelles.