Les gaz atmosphériques qui interviennent dans l'effet de serre sont très minoritaires : ils constituent moins de 1 % de l'atmosphère.

  H2O H2O CO2 CH4 N2O O3 O3 O3 CFCs SF6
  troposphère stratosphère       troposphère non polluée troposphère polluée stratosphère    
Concentration dans l'atmosphère des GES 0 à 4 % quelques ppmv 365 ppmv 1,7 ppmv 0,3 ppmv 0,05 ppmv 0,4 ppmv 0,1 à 6 ppmv 760 pptv 2,3 pptv

ppmv : parties par million de volumes. 0,000 1%
pptv : parties par trillion de volumes. 0,000 000 000 1%
CFCs : Chlorofluorocarbures.
Manque à ce tableau une partie des halocarbures, les perfluorocarbures (PFCs) ainsi que les hydrofluorocarbures (HFCs).

 

 

Bandes d'absorptions :


L'effet de serre est une analogie qui traduit en réalité une propriété physique : l'absorption du rayonnement infrarouge par un corps. 

Donc tous les gaz (ou autres corps) qui sont transparents au rayonnement visible et qui absorbent partiellement le rayonnement infrarouge tellurique participent à l'effet de serre de l'atmosphère.

Pour qu'un gaz puisse jouer un rôle dans l'effet de serre, il faut qu'il ait des propriétés d'absorption, et donc de réémission, dans le domaine d'émission du système Terre atmosphère considéré comme un corps noir autour de 260-280K. Ce domaine spectral correspond à l'infrarouge thermique entre 4 microns et 40 microns. Dans ce domaine, les molécules considérées absorbent un photon et passent d'un état fondamental à un état excité de vibration. Cette capacité d'absorption est alors directement liée aux propriétés spectroscopiques des molécules et donc à leur structure (capacité à "vibrer"). Les molécules diatomiques comme le diazote N2 et le dioxygène O2 n'ont pas cette capacité de vibration et donc n'absorbent pas le rayonnement dans le domaine des longueurs d'onde infrarouge. Elles ne jouent donc pas de rôle dans l'effet de serre.
Voir les graphiques d'absorption : diazote, dioxygène.

Les molécules triatomiques et polyatomiques, qu'elles aient une structure linéaire (comme le gaz carbonique CO2 et le protoxyde d'azote N2O), tétraédrique (comme le méthane CH4) ou sans symétrie d'ordre supérieur (comme la vapeur d'eau H2O, l'ozone O3 ou les CFCs) possèdent des bandes d'absorption dans le domaine infrarouge et peuvent donc jouer un rôle dans l'effet de serre.
Voir les graphiques d'absorption : Vapeur d'eau, dioxyde de carbone, méthane, ozone.

La capacité des constituants atmosphériques à piéger le rayonnement infrarouge est donc liée à leurs propriétés de structure moléculaire. Et leur rôle relatif dans l'effet de serre est alors fonction de leur concentration dans l'atmosphère et du degré d'absorption du spectre déjà effectuée, qui est elle aussi liée à cette concentration relative.

Ainsi, l'effet de serre naturel est principalement dû à H2O et CO2. Compte tenu des concentrations actuelles de ces gaz dans l'atmosphère, aux longueurs d'onde considérées, l'absorption du rayonnement est totale. Une augmentation de concentration de ces gaz ne conduit pas alors à une augmentation proportionnelle de l'absorption car la relation n'est pas linéaire. Ceci explique que le doublement du gaz carbonique de 350 ppmv à 700 ppmv ne conduise qu'à un apport d'énergie supplémentaire de 4 W/m2 alors que l'effet actuel (qui correspond à un passage de 0 ppmv à 350 ppmv) est d'environ 50 W/m2. Ceci explique aussi que des constituants moins abondants comme le méthane (1,7 ppmv), l'ozone (0,05 ppmv) ou les CFCs (760 pptv) puissent au final jouer un rôle relatif important dans l'effet de serre additionnel dans la mesure où leurs bandes d'absorption sont situées à des longueurs d'onde différentes de celles de H2O et CO2.

Ainsi, à masse égale relâchée aujourd'hui dans l'atmosphère, le méthane a un pouvoir de piégeage du rayonnement supérieur à celui du CO2 (voir ci-dessous)

 

Comparaison, pouvoir de réchauffement global :

Nous avons vu plus haut que tous les gaz ne contribuent pas de la même manière à l'effet de serre puisqu'ils n'ont pas tous les mêmes bandes d'absorption. Cependant, pour comparer leur potentiel, on les compare au CO2 sur une durée de 100 ans et on calcule leur "pouvoir de réchauffement global" (PRG).

Le pouvoir de réchauffement global d'un gaz se définit comme le "forçage radiatif" (c'est à dire la puissance radiative que le gaz à effet de serre renvoie vers le sol), cumulé sur une durée qui est conventionnellement fixée à 100 ans, d'une quantité de gaz donnée.
En gros c'est une notion qui permet d'appréhender à la fois sa "puissance instantanée" (le forçage radiatif), découlant de ses raies d'absorption, et sa durée de vie, puisque sur 100 ans nous ne sommes pas loin de la durée de vie de l'essentiel des gaz à effet de serre.
Cette valeur ne se mesure pas dans l'absolu, mais relativement au CO2. Le PRG d'un gaz est donc "combien de fois plus" (ou combien de fois moins) un gaz "fait d'effet de serre sur 100 ans" s'il est émis en même quantité que le CO2.

Il est cependant important de savoir qu'il existe des "zones de recouvrement" entre les différents gaz à effet de serre : plusieurs d'entre eux absorbent les mêmes longueurs d'onde, ce qui fait que l'effet d'un supplément d'un des gaz n'est pas indépendant de la proportion des autres gaz déjà présents dans l'atmosphère.

Le PRG est donc une manière simplifiée de représenter les choses : si l'on voulait être exact, chaque PRG serait une fonction non seulement de la capacité d'aborbsion propre de chaque gaz et de sa durée de vie dans l'atmosphère, mais aussi de la concentration des autres gaz déjà présents.

 

Gaz  Formule PRG relatif / CO2 (à 100 ans)
Gaz carbonique CO2
Méthane CH4 21
Protoxyde d'azote N2O 310
Perfluorocarbures  CnF2n+2 6500 à 8700
Hydrofluorocarbures CnHmFp 140 à 11700
Hexafluorure de soufre SF6 23900 

 

Durée de vie :

Les gaz à effet de serre, une fois dans l'atmosphère, n'y restent cependant pas éternellement. Ils peuvent être retirés de l'atmosphère :

soit par suite d'un phénomène physique. Par exemple la pluie, phénomène physique de condensation, enlève de la vapeur d'eau de l'atmosphère.

soit par suite d'un phénomène chimique intervenant au sein de l'atmosphère. C'est le cas pour le méthane, qui s'élimine par réaction avec des radicaux OH naturellement présents dans l'atmosphère, pour donner du CO2.

soit par suite d'un phénomène chimique intervenant à la frontière entre l'atmosphère et les autres activités de la planète. C'est le cas pour le CO2, qui est réduit par la photosynthèse des plantes, ou qui est dissous dans l'océan pour finir par donner des ions bicarbonate et carbonate (le CO2 est chimiquement stable dans l'atmosphère),

soit par suite d'un phénomène radiatif. Par exemple les rayonnements électromagnétiques énergétiques de courtes longueur d'onde émis par le soleil et les rayons cosmiques (qui sont de même nature que les rayons émis par une source radioactive) "cassent" des molécules dans la haute atmosphère. Une partie des halocarbures disparait de cette façon (ce sont généralement des molécules trop stables pour disparaître par réaction chimique dans l'atmosphère) ainsi que de l'oxygène qui se transforme en ozone et vice versa.

Mis à part la vapeur d'eau, qui s'évacue en quelques jours, les gaz à effet de serre mettent très longtemps à s'en aller de l'atmosphère. Il n'est pas encore possible de savoir avec précision combien de temps est nécessaire, d'autant plus que les phénomènes qui déterminent leur destination dépendent de toutes les activités de la biosphère en général et aussi des activités humaines. On a malgré tout une estimation de la durée de séjour, c'est à dire du temps qui est nécessaire à ce que le gaz en surplus disparaisse de l'atmosphère, pour les principaux d'entre eux.

Gaz Durée de séjour approximative dans l'atmosphère
Gaz carbonique 100 ans
Méthane 12 ans
Protoxyde d'azote 120 ans
Halocarbures plusieurs siècles

ATTENTION- Les données ci-dessus sont issues des mesures et calculs sur la base de l'atmosphère actuelle et sont donc susceptibles de changer en même temps que les interrelations générales du climat.

 

EXEMPLES SUR D'AUTRES PLANETES DU SYSTEME SOLAIRE :

Ailleurs dans le système solaire les phénomènes sont régis par les mêmes principes. Nous allons comparer la Terre avec deux planètes telluriques qui lui ressemblent plus qu'il n'y paraît de prime abord : Vénus et Mars.

Comme nous l'avons vu au chapitre précédent ces deux planètes se sont formée de la même manière que la Terre, avec les mêmes matériaux et pendant la même période. Pourtant les environnements planétaires ont évolués sensiblement différemment pour deux raisons :
- Elles ne sont pas situées à la même distance du Soleil.
- Elles n'ont pas la même taille.

Comparaison des compositions atmosphériques :

 
TERRE
TERRE (*)
VENUS
MARS
CO2 Dioxyde de carbone
0,03 %
94 %
96,1 %
95,3 %
N2 Azote moléculaire
78,1 %
2,3 %
3,5 %
2,7 %
Ar Argon
0,9 %
0,02 %
0,007 %
1,6 %
H2O Vapeur d'eau
0 à 4 %
/
0,002 %
0,03 %

On remarque deux tendances différentes : Vénus et Mars ont une chimie atmosphérique dominée par CO2 tandis que La Terre présente une atmosphère à 80% constituée de diazote.

(*) Vénus et Mars présentent des atmosphères de composition chimique très proche. De manière à comparer les valeurs des compositions chimiques des atmosphères de Vénus et Mars à celles de la Terre, une correction aux valeurs terrestres a été apportée. Sur Terre, l’activité biologique a profondément modifié la chimie atmosphérique. Il nous faut donc corriger cette chimie du facteur biologique absent sur les autres planètes. Pour ce faire, nous avons retiré l’oxygène (d’origine biologique exclusivement – mO2 = 1.1018 kg) et réinjecté dans l’atmosphère l’équivalent de CO2 qui serait produit par dissolution des carbonates terrestres, soit 2.1020 kg (la précipitation de carbonates dans l’eau de mer est un processus quasiment exclusivement sous contrôle biologique, voir le chapitre suivant la symbiose planétaire) Ces corrections donnent une masse pour l’atmosphère de 2,1.1020 kg (contre 6,1.1018 kg actuellement) et amènent à des compositions atmosphériques de 94 % en CO2 et 2,3 % en N2, compositions très proches de celles mesurées sur Vénus et Mars.

La Terre, Vénus et Mars sont donc trois planètes de chimie atmosphérique identique. Reste le problème de l'eau, qui devrait se trouver sous forme de glace sur Mars et sous forme de vapeur sur Vénus.

 

VENUS :

L’eau est un élément volatile qui se concentre à la surface des planètes. Sur Vénus, il ne peut y avoir d’eau liquide en surface car la température y est trop élevée : Tsurf = 460°C.La gravité de Vénus étant assez forte pour retenir l'eau, elle ne peut donc se trouver que sous forme vapeur dans l’atmosphère. Or, cette dernière est quasiment dépourvu de vapeur d’eau (20 ppm).

Mesure de la quantité d'eau initiale d'une planète :
Comme nous l'avons vu au chapitre un, il existe plusieurs isotopes d'un même atome, dans le cas de l'hydrogène prenons le deutérium (D). Cet atome peut prendre la place d'un atome d'hydrogène simple dans une molécule d'eau et former alors HDO au lieu de H2O. Cette molécule est appelée "eau lourde", nous savons par mesure le rapport qu'il existe entre la quantité d'eau normale et d'eau lourde dans l'eau initiale d'une planète, il suffit donc de mesurer le rapport actuel entre H/D pour savoir quelle quantité d'hydrogène s'est échappée (le deutérium étant plus lourd, il s'échappe plus lentement). Sur Vénus ce rapport est 120 fois plus important que la valeur terrestre, il y a donc eu sur Vénus 120 fois plus d'eau qu'actuellement.

L'eau initiale de Vénus est probablement restée sous forme de vapeur car la planète reçoit plus d'énergie du Soleil, contrairement à celle de la Terre qui a très rapidement été condensée en eau liquide. Cette vapeur d'eau initiale, en grande quantité dans l'atmosphère, a contribué avec le CO2 à maintenir un effet de serre important dès la formation de la planète. Par la suite, la vapeur d'eau a probablement été intégralement photolysée par les U.V. solaires, ce qui n'a pas pu se produire sur Terre à cause de l'état liquide de l'eau. L'eau est donc devenue H2 et O2. Le dihydrogène, molécule légère, a quitté la planète malgré la gravité importante. Cette fuite importante de dihydrogène est confirmée par le rapport isotopique de l'eau résiduelle. Mais le dioxygène, molécule lourde n'aurait pas du partir, or elle n'est pas présente dans l'atmosphère.
La théorie actuelle pour expliquer ce manque est que cet O2 a complètement oxydé la lithosphère de Vénus. Mais il faudrait tout de même oxyder l'intégralité du Fe++ des silicates en Fe+++ sur quelques dizaines de km d'épaisseur pour absorber tout le dioxygène théorique de Vénus.

Volcanisme :
Vénus est une planète volcaniquement active. Les volcans y sont partout, de tous types. Mais ils ne présentent aucun alignement, il n'y a donc aucune trace de dorsales ou de subduction. Si on applique le modèle terrestre, Vénus est un champ de points chauds ou de zones locales de fractures lithosphériques.
La Terre et Vénus ayant sensiblement la même taille et la même masse, on pourrait s'attendre à ce que ces 2 corps aient la même dynamique interne. Il n'en est rien, puisqu'il n'y a pas de traces de tectonique des plaques sur Vénus. Cependant l'absence de tectonique des plaques serait due à l'absence d'H2O qui entraîne un écart de viscosité entre la lithosphère et l'asthénosphère.

Mouvements atmosphériques :
Les mouvements de l'atmosphères Vénusienne n'ont pas grand chose à voir avec ceux de la Terre dans la mesure ou la planète ne tourne que très lentement sur elle-même et dans le sens inverse. De plus, le cycle de l'eau étant abscent, l'atmosphère ne produit pas sur le sol ce qui pourrait s'apparenter avec un climat. Malgré tout, il y a une forte circulation convective sur le modèle de Hadley, qui peut entrainer des vents de plus de 300 km/h.

Magnétisme :
Vénus n'a pas de champ magnétique parce qu'elle ne tourne pas assez vite sur elle-même, il n'y a donc pas d'effet dynamo au sein de son noyau.

 

MARS :

Encore une fois, l'eau qui devrait se trouver sur Mars manque à première vue. Pourtant, nous savons qu'il y a eu de l'eau sous forme liquide à sa surface, et même, beaucoup d'eau. D'abord parce que les traces qu'a laissé l'érosion de l'eau son encore visibles un peu partout sur la planète, ensuite parce que l'on a là aussi mesuré le rapport isotopique : 6 fois plus elevé que sur Terre. Pour expliquer le manque d'eau, encore une fois nous supposons que l'eau quand elle se trouvait sous forme de vapeur s'est décomposée et que l'hydrogène est parti. Cependant, Mars étant bien plus éloignée du Soleil et de surcoit petite, elle reçoit peu d'énergie et s'est rapidement refroidie.

Un modèle réduit de la Terre :
Mars reste très intéressante car c'est la planète qui garde le plus d'analogie avec la Terre, bien qu'elle soit deux fois plus petite et bien loin du Soleil, elle tourne sur elle-même dans le même sens en presque un jour. On peut l'étudier comme un modèle réduit accéléré de la "vie" d'une planète tellurique :
Au début, Mars est chaude des impacts de sa formation, elle a un volcanisme important qui densifie l'atmosphère et son noyau liquide lui confère un magnétisme qui la protège du vent solaire naissant. Comme l'atmosphère est dense et plus chaude, de l'eau liquide court sur la surface.
Ensuite la planète se refroidit, comme elle est relativement petite, sa chaleur initiale décroit ainsi que son volcanisme. Du coup son atmosphère décroit également car elle n'est plus alimentée, l'eau s'échappe petit à petit soit en se dissociant soit en étant emprisonnée sous forme de glace. Le noyau se refroidissant également, la dynamo planétaire s'essouffle et le champ magnétique diminue.
Finalement, toute activité volcanique s'est éteinte, le champ magnétique n'est plus présent que par les traces qu'il a laissé, l'eau liquide a disparu, l'atmosphère est réduite à un mince filet de ce qu'elle était et se trouve bombardée directement par le vent solaire que plus rien n'entrave. Il s'attaque aux molécules de CO2 en les transformant en CO, les rares molécules de vapeur d'eau encore présentes sont elles-aussi dissociée et contribuent à recombiner le CO en CO2, l'hydrogène en profitant pour s'échapper à chaque fois.
L'atmopshère est condamnée à perdre toute sa vapeur d'eau, ensuite l'atmosphère perdra tout son CO2 qui se transformera en CO, pour aboutir à un état stable et complètement stérile.

CONCLUSIONS :


La Terre n'est pas très éloignée de ses voisines inhospitalières, il suffirait d'une pichenette à l'échelle spatiale pour que la vie qui entretient l'étrange composition de l'atmosphère terrestre rende son tablier.

 Que serait la Terre si la vie n'avait pas éclot dessus ? Certainement à mi-chemin entre Vénus et Mars, avec une atmosphère chaude et lourde, un effet de serre puissant qui entretiendrait une température limite pour l'eau sous forme liquide, peu ou pas d'eau liquide, de toutes petites calottes polaires saisonnières, pas de couche d'ozone, et la perspective de finir comme Mars dans un long, long moment, après que le volcanisme se soit lui aussi arrété.