Plus de 12 000 espèces menacées dans le monde



crédit : André Brunsperger

http://www.notre-planete.info/

 

sont connues pour être menacées   Nous n’en sommes qu’à explorer la partie émergée de l’iceberg dans notre évaluation du statut de toutes les espèces connues, nous sommes confiants du fait que ce chiffre est un indicateur de l’état global de la diversité biologique » dit Achim Steiner, Directeur général de l’UICN.

La liste rouge de l’UICN des espèces menacées, considérée dans le monde comme le meilleur inventaire de l’état de conservation des plantes et des animaux, vient d'être mise à jour dans son édition 2003.
Des milliers de scientifiques et de spécialistes de la conservation du monde entier contribuent à la production de cette liste en rapide expansion, compilée parl’UICN – Union mondiale par la nature, grâce à sa Commission de la sauvegardedes espèces (CSE) et ses organisations partenaires.

Plus de 2 000 nouvelles entrées ont été ajoutées depuis l’édition de la Listerouge 2002, et 380 taxa (espèces, sous-espèces etc.) ont été réévaluées. LaListe rouge de l’UICN comprend désormais 12 259 espèces menacées d’extinction (entrant dans les catégories En danger critique d’extinction, En danger ou Vulnérable). Un total de 762 espèces de plantes et d’animaux est maintenant considéré comme Éteint auquel s’ajoutent 58 espèces vivant seulement en culture ou en captivité.

La Liste comprend cette année quelques additions notables telles que 1 164plantes équatoriennes, 125 plantes hawaïennes, 303 cycadacées et 35escargots des îles Galápagos. Toutes les espèces connues de conifères ont maintenant été évaluées, y compris une nouvelle espèce découverte au Vietnam et une espèce redécouverte en Chine. Les nombreux mouvements vers des catégories de menace supérieure incluent un des plus grands poissons d'eau douce du monde, trois singes néo-tropicaux et six albatros.

« La Liste rouge de l’UICN des espèces menacées fournit la meilleure information disponible nécessaire à une solide action de conservation. Il faut maintenant une volonté politique et les ressources pour endiguer la perte debiodiversité. Les activités humaines sont peut-être la principale menace pour les espèces dans le monde mais l’homme peut aussi aider à leur rétablissement –l’ibis à crête de Chine, l’oryx d’Arabie et le rhinocéros blanc sont quelque sexemples » ajoute Achim Steiner.

Des îles en péril
Des populations de plantes et d’animaux originaires des îles disparaissent sousl’effet d’espèces envahissantes étrangères qui constituent une grande menacepour la biodiversité. Des centaines de nouvelles évaluations de plantes d'Hawaï,des îles Falkland (îles Malouines), des îles Vierges britanniques, des Seychelles,de Tristan da Cunha, Ste Hélène et de l’Ascension révèlent de mornes perspectives.
Sur Tristan da Cunha, Ste Hélène, l’île de l’Ascension ou les îles Falkland(Malouines) dans l'Atlantique sud se sont développés des assemblages uniques d’animaux et de plantes qui sont extrêmement vulnérables aux perturbations d’origine humaine. Comme sur de nombreuses autres îles dans le monde, la destruction d'habitat, l’introduction d’animaux herbivores et la prédation par, ou la concurrence avec, les espèces envahissantes persistent. En guise d’exemple,les espèces envahissantes ont causé l'extinction de quatre espèces de plantes sur l’île de l’Ascension que l’on ne trouve nulle part ailleurs.
Les plantes d’Hawaï sont également sérieusement menacées par des espèces envahissantes. Les animaux herbivores introduits dans les îles vers la fin du18ème siècle y ont causé d’importants dégâts. Alors que les plantes autochtones déclinent, les individus restants résistent difficilement à la compétition avec les mauvaises herbes introduites et aux attaques d’insectes, dont un bon nombre a également été introduit. La disparition d'espèces pollinisatrices qui ont évolué avec certaines plantes signifie qu’il y a très peu, voire aucune chance pour ces plantes de se reproduire. Si l’on y ajoute l’urbanisation, les infrastructures touristiques, et l'agriculture, le futur de la flore hawaïenne paraît sombre.
Parmi les 125 évaluations de plantes endémiques (trouvées nulle part ailleurs)hawaïennes ajoutées à la Liste rouge cette année, 85 sont menacées et ce nombre est appelé à augmenter. Un exemple est l’hesperomannia de Maui(Hesperomannia arbuscula), un arbuste en danger critique d’extinction, poussé à disparition par des menaces variées telles que la dégradation de l’habitat par lesporcs, la concurrence avec des espèces introduites (par exemple la mûre épineuse de Floride et le chardon de Koster), la prédation par les rats, le piétinement ou la cueillette par l’homme. Il reste moins de 25 individus de cette espèce végétale.

Les plantes d’Hawaï ne sont pas les seules menacées par les « envahisseurs ».L'escargot de Newcomb (Erinna newcombi), classé Vulnérable, démontre leseffets des invertébrés envahissants sur la faune endémique de l’île. L'escargotde Newcomb ne se trouve que dans les chutes d’eau, infiltrations et sourcesisolées, de 6 cours d’eau sur l'île de Kauai où diverses introductionsintentionnelles et accidentelles de poissons, escargots, mouches et grenouillesd'origine étrangère menacent sa survie. La menace la plus grave est la prédationpar l'escargot carnivore Euglandina rosea, introduit en 1955, qui a par ailleurséradiqué de nombreuses espèces endémiques de Polynésie et des îlesMascareignes.
Les escargots des îles Galápagos sont également dans une situation précaire –49 espèces ont été évaluées ou réévaluées pour la Liste de cette année etbeaucoup d’entre elles sont En danger critique d’extinction, et peut-être déjàéteintes. Les espèces envahissantes, chèvres, porcs, et fourmis de feu, en sontla principale cause.

« Des endroits tels que les Galápagos, Hawaï et les Seychelles sont célèbres pour la beauté qu’elles doivent à la diversité des plantes, des animaux, et desécosystèmes qu’elles abritent. La Liste rouge nous indique que les activités humaines nous conduisent vers une vague d’extinctions qui pourrait rendre ces îles écologiquement et esthétiquement stériles », dit Steiner.

Les espèces continentales au bord du gouffre
La situation des espèces continentales n’est guère meilleure. Parmi les singes d’Amérique latine, trois espèces ont été reclassées dans des catégories de menace supérieures. Le singe hurleur noir du Mexique (Alouatta pigra) est passé du statut de Préoccupation mineure à En danger. Il a déjà été confronté à une perte de 56% de son habitat et, à ce rythme, la population pourrait décliner deplus de 70% au cours des 30 prochaines années.
Le singe araignée varié (Ateles hybridus), que l’on ne trouve qu’en Colombie etau Venezuela, passe de En danger à En danger critique d’extinction, et est maintenant dans une situation de risque extrême. Il en est de même pour le tamarin bicolore, menacé par la perte d'habitat due à la croissance urbaine,l’agriculture et le pâturage du bétail. Il passe également de En danger à En danger critique d’extinction. Une seule espèce de primates, le tamarin-lion doré (Leontopithecus rosalia), aété reclassée dans une catégorie de menace inférieure, passant de En danger critique d’extinction à En danger. Après presque 30 ans d'efforts de conservation, incluant l'établissement d'une nouvelle sous-population partranslocation vers une nouvelle aire protégée, la population a augmenté.

En Asie, le poisson-chat géant du Mékong (Pangasianodon gigas), un des plus grands poissons d'eau douce du monde, pouvant mesurer jusqu'à 3 mètres de long et peser jusqu'à 300kg, ne se trouve que dans le bassin du fleuve Mékong(Vietnam, Cambodge, Thaïlande et Laos). Il est passé de En danger à En danger critique d’extinction. Ceci est principalement dû à la surpêche, la perte d'habitat (par exemple due à l’envasement et au dragage) et au blocage des itinéraires de migration par la construction de barrages. Sa population a diminué de plus de 80% au cours des 13 dernières années.

Le lapin des Boschimans d'Afrique du Sud (Bunolagus monticularis) est passéde En danger à En danger critique d’extinction. On ne rencontre cette espèceque dans la région centrale de Karoo, et on estime sa population à moins de 250couples reproducteurs. Avec la perte et la fragmentation continue de son habitat,le piégeage, la prédation par les chats et chiens sauvages, la population devraitencore décliner.

La Liste rouge « verdit » :
La Liste rouge accomplit de grands progrès en augmentant le nombred'évaluations de plantes. Toutes les espèces connues de cycadacées et deconifères ont été maintenant évaluées.
Cette année 1 164 espèces de plantes d’Equateur ont été ajoutées à la Listerouge : 813 sont menacées. Parmi les exemples notables figure l’arbusteCentropogon erythraeus, En danger, dont il existe seulement deux souspopulations dans le sud des Andes. L'Equateur est extrêmement important pourla conservation des plantes, car il comprend quatre régions très diversifiées –l'archipel des Galápagos, les plaines côtières, les Andes, et l'Amazone –confinées sur une surface équivalente à la superficie de l'Italie.
Les cycadacées, les plus anciennes plantes à graines de la planète, figurentmaintenant également parmi les plantes les plus menacées. Deux espèces sontdéjà Eteintes à l’état sauvage, et d’autres sont sur le point de les rejoindre. Cetteannée, 303 espèces de cycadacées ont été évaluées : 155 (plus de 50%) sontmenacées. Cela fait des cycadacées un des groupes d’espèces les plusmenacés actuellement sur la Liste rouge.

Les botanistes ont été heureux de rapporter la découverte d’un nouveau genrede conifère, Xanthocyparis vietnamensis au Vietnam en 2001; mais l’espèce aété classée dans la catégorie En danger, compte tenu de son aire de répartitionrestreinte et du déboisement continu de la région. En outre, l’espèce Thujasutchuenensis, qu’on croyait Eteinte à l’état sauvage, a été redécouverte enChine en 1999, 100 ans après qu'on l'ait vu pour la dernière fois. Le bois de cetarbre est particulièrement résistant à la putréfaction et est utilisé dans laconstruction d’habitations. Il ne reste qu’une sous population dans une zoneisolée et en grande partie inaccessible et l'espèce est En danger critiqued’extinction.

De nouveaux règnes font leur apparition dans la Liste rouge
Cette année, pour la première fois, la Liste rouge prend en compte les algues etles lichens. L'algue de Bennett (Vanvoorstia bennettiana) a été déclarée Eteinte.On ne l’a collectée que dans deux endroits dans le monde (Nouvelle Galles duSud, Australie) et elle n'a pas été recensée depuis plus d’un siècle. Tous lessites où cette espèce était présente ont été détruits par des activités humaines.
Le lichen Cladonia perforata de Floride est listé comme En danger en raison deson aire de répartition restreinte, de la perte d'habitat, des ouragans et desincendies. L’espèce Erioderma pedicellatum est En danger critique d’extinction.On la rencontrait au Canada, en Norvège et en Suède, mais sa population afortement décliné au cours des 100 dernières années ; on pense qu’elle estéteinte dans les deux derniers pays cités.

Menace sur le monde marin
En ce qui concerne le monde marin, six espèces d'albatros font maintenant faceà un plus grand risque d'extinction que par le passé, en grande partie en raisonde la pêche à la palangre. Les 21 espèces d’albatros de la planète sont maintenant toutes considérées comme globalement menacées contre 16 dans laListe rouge 2000.
L'albatros à sourcils noirs (Thalassarche melanophrys) est passé de Vulnérableà En danger. C’est une des espèces les plus fréquemment tuées par la pêche àla palangre et elle est également victime de la pêche au chalut.
Cette année, le statut de conservation de 175 espèces de requins et raies a étéévalué ou réévalué. 57 espèces et 19 stocks supplémentaires sont maintenantconsidérés comme menacés. La biologie des espèces de requins des grandsfonds les rend particulièrement vulnérables aux changements d'habitat et auxpressions de la pêche. À mesure que le développement commercial denouvelles pêcheries en eaux profondes augmente, quelques espèces pourraientêtre conduites à l'extinction avant que l’on puisse mettre en place des mesuresde gestion, et peut être même avant qu’elles n’aient été découvertes ou décrites.La sous-population d’aiguillat commun (Squalus acanthias) du nord-est del’Atlantique est maintenant En danger tandis que la sous population du nordouestde l’Atlantique est Vulnérable. La demande élevée sur les marchéseuropéens a stimulé la pêche dans le nord-ouest et le total des prises résultantd’un effort de pêche intense dans le nord-est est en déclin depuis le début desannées soixante.

La sous population méditerranéenne du dauphin commun (Delphinus delphis) arejoint la liste dans la catégorie En danger. Sa population a décliné de plus de50% dans la région méditerranéenne au cours des 30-40 dernières années enraison de la réduction du nombre de ses proies due à la surpêche et ladégradation de l’habitat. Le niveau élevé de PCB (biphényles polychlorés) trouvédans ces dauphins comparé à celui trouvé dans des dauphins d'autres régionsest également un sujet d'inquiétude.
Malgré le manque de données pour évaluer le statut de l’espèce à un niveauglobal, la sous population de dauphin de la Plata (Prontoporia blainvillei) du RioGrande do Sul en Uruguay entre dans la Liste dans la catégorie Vulnérable. Sapopulation a décliné de plus de 30% depuis les années 60, principalement enraison de la pêche au filet maillant dans lesquels les animaux se noient, ladisparition de ses proies et la pollution chimique.

Une nouvelle entrée dans la Liste rouge cette année, dans la catégorie Endanger critique d’extinction, est celle de l'ormeau noir de Californie (Haliotiscracherodii), un escargot marin confiné aux zones côtières de Californie, et deBasse Californie (Mexique). Son déclin est partiellement dû à la pêchecommerciale, mais la principale menace est une maladie appelée le syndromede flétrissement qui a causé un déclin massif de la population.

« On pense que les espèces marines résistent bien aux risques d’extinction maiselles sont en train de démontrer rapidement qu’elles sont aussi vulnérables queles espèces terrestres. Il y a donc un besoin critique d’améliorer les politiques etles pratiques de gestion de notre environnement marin » dit David Brackett,Président de la Commission de la sauvegarde des espèces de l’UICN.

Une sonnerie d’alarme
L'Indonésie, l'Inde, le Brésil la Chine et le Pérou sont parmi les pays comptant lenombre le plus élevé d’espèces connues de mammifères et d’oiseauxmenacées, alors que les plantes sont en déclin rapide en Equateur, Malaisie,Indonésie, Brésil et Sri Lanka.

« La Liste rouge est un outil important pour évaluer les progrès dans la réductionde manière significative de la perte de diversité biologique d’ici à 2010, objectiffixé par les nations l’année dernière lors du Sommet Mondial sur leDéveloppement Durable » dit Craig Hilton-Taylor, en charge du programme de laListe rouge. «La Liste rouge est avant tout un signal d’alarme pour nous tous. Entravaillant ensemble, nous pouvons aider à conserver ce qui reste de labiodiversité sur terre. »